Internet consomme autant d'énergie que toute l'humanité ! Un mauvais rêve à l'heure actuelle, certes ! mais qui pourrait bien se révéler prémonitoire. De récentes études mettent en cause les centres de données alimentant la Toile qui font une consommation d'énergie pantagruélique. Le monde de l'informatique, déjà touché de plein fouet par l'écologie, s'attaque à un nouvel enjeu majeur. Pour preuve, l'ouverture d'un CeBIT 2008, tout de Green vêtu, sous le signe de l'environnement.
Cette année le CeBIT qui s'est ouvert mardi dernier à Hanovre surfe sur la tendance écologique, ce qui est, en soi, une excellente nouvelle. C'est donc le Hall 9 qui accueille le Green IT Village et ses exposants. L'objectif est de développer des solutions pour réduire la consommation en énergie de l'informatique et d'atteindre une économie de l'ordre de 50% d'ici 2010. Plusieurs produits verts sont exposés : le serveur rack RX300 S4 de Fujitsu Siemens qui réduit de moitié les besoins d'énergie ; un écran 22'' ne consommant rien lorsqu'il est en veille ou encore le système de refroidissement de serveurs par géothermie de l'entreprise allemande Brach+Roll.
Un exposant manque cependant à l'appel. On ne peut s'empêcher de chercher des yeux l'association écologique Greenpeace que l'on ne trouvera pas dans le « village vert » mais ailleurs dans le salon. Qu'à cela ne tienne, un gros container rempli de déchets électroniques et informatiques, installé sur leur stand, tranche avec la déco très « écolo » du village (tapis vert et orchidées délicates et immaculées) et rappelle aux visiteurs que l'écologie n'est pas qu'une histoire de marketing. « Nous voulons encourager les entreprises à sortir les substances nocives de leurs appareils. Elles ne doivent pas se contenter de lancer des produits énergétiquement efficients. Il faut qu'elles améliorent leur processus de production, ou ceux des assembleurs qui travaillent pour elles. Enfin, nous souhaitons faire réfléchir les constructeurs sur la notion de cycle de vie des produits » rappelle Yannick Vicaire, responsable des campagnes toxiques.
Car l'enjeu écologique est sérieux
Plus que sérieux même : plusieurs études pointent du doigt la voracité énergétique d'Internet. Ainsi, selon Siegfried Behrendt, chercheur de l'institut de recherche berlinois IZT, lorsqu'un consommateur télécharge la version électronique d'un quotidien, il consomme autant d'énergie que lorsqu'il fait une lessive. Autre exemple tout aussi parlant, celui relevé par l'entreprise allemande de services informatiques Strato : une recherche sur le site Google est équivalente à une heure de lumière dispensée par une ampoule à économie d'énergie. Dernier point de comparaison : les avatars de Second Life. Sachez que l'un de ces personnages virtuels consomme en moyenne la même quantité d'électricité chaque année qu'un habitant du Brésil !
Ce monde virtuel ne l'est qu'en apparence. En effet, Internet base son fonctionnement sur une multitude de serveurs regroupés en centres de données géants (data centers). Ainsi, en plus des soucis écologiques bien connus du côté de l'utilisateur et liés à son poste informatique individuel (composants toxiques, consommation d'énergie...), s'ajoutent ceux à l'autre bout de la chaîne. Ces data centers consomment infiniment plus d'énergie à cause de leur taille et des ordinateurs aux capacités de calcul phénoménales qui les composent. En effet, ils stockent et transmettent sans arrêt les données des internautes du monde entier ! D'après une étude commandée par le fabricant de composants AMD et réalisée par l'université américaine de Stanford, les plus grandes « fermes informatiques » du monde font tourner chaque année 14 centrales électriques. Leur consommation d'électricité a doublé entre 2000 et 2005.
Des solutions pour inverser la tendance dès aujourd'hui
Gerhard Fettweis, universitaire de Dresde, tire la sonnette d'alarme en précisant que si la tendance ne s'inverse pas, Internet consommera, dans moins de 25 ans, autant d'énergie que toute l'humanité aujourd'hui ! Siegfried Behrendt établit un diagnostic similaire : « tout est possible. Soit rien ne change, et la consommation des centres de données augmente encore de 50%. Soit de réels efforts sont faits, et là c'est une baisse de 50% qui est envisageable ».
Ces données parlent aux entreprises du secteur. Les centres de données ont constamment besoin d'être refroidis et donc la climatisation est indispensable pour éviter la surchauffe. IBM présente un circuit de refroidissement proche de celui des centrales électriques. Microsoft, dont le data center couvre l'équivalent de sept terrains de football, est placé à proximité de centrales hydrauliques, par souci écologique. Enfin, l'une des solutions réside dans la « virtualisation » : en réduisant le nombre de serveurs matériels, les entreprises réduiront l'impact sur l'environnement. Et comme l'a rappelé Steve Ballmer, PDG de Microsoft, lundi soir au CeBIT « Il s'agit de notre responsabilité : s'appuyer sur l'innovation pour réduire la consommation d'énergie ».
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